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10 novembre 2011 4 10 /11 /novembre /2011 13:39

leplus.jpgChers lecteurs et visiteurs réguliers,

La campagne commence enfin ! Nous entrons en phase réellement opérationnelle pour un certain nombre d'amis et de clients que je conseille : petits et grands candidats, porte-parole, et quelques débutants.

 

Je continuerai ces hommages situationnistes à Jacques pilhan sur "Le Plus" qui m'a récemment sollicité pour accueillir mes papiers.

 

J'espère que vous me suivrez dans cette nouvelle aventure : http://leplus.nouvelobs.com/leblogduconseiller

 

Le Conseiller

leblogduconseiller@gmail.com

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7 novembre 2011 1 07 /11 /novembre /2011 12:02

L’UMP m’a consulté samedi pour connaître mon analyse du voyage de Marine Le Pen aux Etats-Unis. Ce n’était sans doute pas le fait majeur de la semaine passée mais si les médias ont su en rendre compte dans les moindres détails, ils n’ont pas su interpréter les signes que ce voyage renvoyait dans l’opinion. Je leur proposai donc de passer de la question « ce voyage est-il réussi et est-il compris comme tel ? » à « quelle alchimie produit-il entre la candidate des protestataires de tout bord et la candidate introduite dans le système ? ».

J’ai formulé deux hypothèses, sans être pleinement capable de trancher.

1.       Ce voyage chez les grands dénature l’ambition protestataire de Marine Le Pen. En quête d’un crédit diplomatique dont elle ne dispose pas, elle tente de décrocher les trophées de quelques rencontres opportunes avec des décideurs et des opposants. C’est le schéma classique d’un candidat à l’élection présidentielle que les électeurs doivent assimiler très tôt à un grand ou un futur grand de ce monde. La politique étrangère appartient au domaine réservé du président de la République et il faut s’en attribuer la capacité pour être jugé apte à la fonction.

 

Si cette hypothèse est la bonne, alors il importe peu que cette visite officielle, en pleine semaine du G20 comme pour essayer de la contre-programmer, soit un cuisant échec. L’intention demeure dans l’opinion : Marine Le Pen a voulu se hisser au niveau d’un candidat républicain (même distancé dans la course à la primaire), elle s’est présentée devant les portes du FMI et a occupé une salle de réunion de l’ONU avec quelques représentants diplomatiques de second rang.

Ce voyage rompt ainsi avec la stratégie d’outsider anti-système du Front National. Si elle multipliait ces initiatives avant le 22 avril 2012, Marine Le Pen se construirait en force politique alternative et non en « parti politique anti-politique » tel que son père a voulu que son parti soit depuis qu’il l’a fondé.

 

Si c’est le cas, alors Marine Le Pen perdrait plus d’électeurs protestataires qu’elle ne gagnerait de suffrages auprès de ceux qui la jugeraient assez capable pour gouverner. Cette stratégie pourrait donc conduire à une dilution de son capital de protestation au profit d’autres candidatures.

On peut en effet difficilement critiquer le FMI « affameur de peuples » et l’ONU « officine mondialiste » et essayer ensuite d’en rencontrer les représentants… sauf à médiatiser le refus de ces derniers, ce qu’elle a fini par faire en fin de semaine dernière.

 

Poursuivons l’hypothèse : Marine Le Pen veut faire du Gianfranco Fini en accéléré. Passer du patron de parti post-fasciste (le Mouvement social italien transformé en Alliance nationale) en leader du centre-droit italien, alternative rassurante à la présidence de Silvio Berlusconi. Mais entre temps, Fini avait pactisé avec la parti majoritaire de la droite italienne, considérablement modéré son discours politique, avait fait un voyage remarqué au mémorial de Yad Vashem (Tel Aviv) et il était devenu président de la Chambre des députés après avoir été ministre des Affaires étrangère et vice-président du Gouvernement.

 

Mon opinion est donc que Marine Le Pen a grillé les étapes et qu’elle peut perdre le luxe de fédérer les 20% d’électeurs protestataires le 22 avril prochain. Elle aurait dû multiplier les initiatives avec des représentants européens des majorités ou des oppositions nationales, et puiser dans l’Europe les sources d’un discours international moins confus et politiquement cohérent.

 

2.      Dans une seconde hypothèse, Marine Le Pen réussit la synthèse et incarne une candidature crédible et réellement alternative dans l’opinion car elle aura puisé dans le système politique assez de connaissance et de relations pour le transformer. Y goûter, un peu mais pas trop, au bon moment, et Marine Le Pen peut figurer en tête des personnalités politiques dont les Français voudraient qu’elles gouvernent – et non qu’elles président – après 2012.

Dans ce cas, cette visite a été mal préparée et n’a pas rencontré tout l’écho qu’elle devait auprès de l’opinion. En voulant contre-programmer la semaine du G20, Marine Le Pen ne pouvait pas sérieusement espérer attirer vers elle la lumière. En allant au cœur des institutions d’une gouvernance mondiale qu’elle critique tant, elle ne pouvait pas espérer être reçue ni bien comprise de son électorat, à moins de « marcher sur Washington et New York ».

 

Mais cette visite est une pierre dans le jardin de l’électorat centriste ou indécis qu’aucun candidat ne parvient encore à capter.

 

3.      Les conséquences pour l’UMP sont grandes car Marine Le Pen entretient la confusion entre le profil dont elle essaie de se doter, son programme et la droite de l’UMP. Au jeu de la capacité à gouverner avec sérieux, elle peut disputer beaucoup d’électeurs aux candidats de la Droite populaire. Et faire ainsi tomber l’argument majeur de Nicolas Sarkozy face à Jean-Marie Le Pen auprès de ces électeurs en 2007 : « votez pour moi plutôt que pour lui, car moi, je serai élu et donc en capacité d’agir ». En infligeant des coups répétés à la ligne Maginot qui opposait clairement hier le RPR/UMP au Front National, la Droite populaire a permis à Marine Le Pen d’entrer dans son champ et de s’attribuer progressivement des qualités de co-gouvernante de la France.

 

Dès lors, une expérience de gouvernement où participerait le Front National n’apparaîtra plus perturbatrice aux yeux de beaucoup d’électeurs et le leadership idéologique et politique de l’UMP sera considérablement challengé. C’est moins la question de la présidentielle que celle des législatives de juin 2012 qui est posée.

 

J’ai conclu en suggérant à Nicolas Sarkozy de faire campagne en gouvernant, et de gouverner en faisant campagne. De se cantonner à son domaine réservé (la défense des intérêts supérieurs de la France), de ne laisser personne occuper cette position, et de déployer un discours au centre de la droite.

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3 novembre 2011 4 03 /11 /novembre /2011 17:12

Depuis mon départ il y a treize ans, certaines mœurs ont disparu de la scène française. Fumer au café, stationner sur les trottoirs ou décrocher son téléphone pour dormir en paix. En revanche, il en est d’autres dont s’accommodent encore paisiblement les médias français et ceux qui y parlent.

 

La première habitude est celle du « ON » et du « OFF ». Tout bon communicant apprend dès son premier rendez-vous avec un journaliste qu’il dispose d’au moins deux registres de discours : le ON, pour tenir des propos qui pourront immédiatement être cités et attribués ; le OFF, pour parler et être éventuellement repris sans que la source des propos ne soit identifiable par le public. Plus raffiné encore, le « OFF de OFF », pour tenir un discours qui doit rester strictement confidentiel et anonyme.

 

Le droit coutumier français de la communication prévoit également que le journaliste puisse s’approprier des propos tenus en OFF ou qu’il les place dans la bouche d’un locuteur fictif ou désigné : une « source proche du dossier », un « conseiller », un « ami »… voire même une personne réelle qui se verra ensuite accusée d’avoir tenu de tels propos. C’est finalement rassurant en un point : l’idéologie de la transparence a plus de fidèles que de praticiens quotidiens.

 

Mais cela demeure singulièrement hypocrite. En vérité, la différence entre le ON et le OFF n’est pas une question de confidentialité mais de temps et d’espace. Parler en OFF, c’est conserver la maîtrise de ses propos au cours d’une durée et d’un espace élargis : « Ce que je te dis, fais en bon usage mais à tel moment et à tel endroit de ton article, de ton enquête et de ton journal ». Dans le rapport de force entre le locuteur et le média, c’est une arme de poids dont la force dissuasive est liée au pouvoir et à l’autorité du locuteur.

Comme l’avait révélé Franz-Olivier Giesbert, le président Mitterrand savait parfaitement en user : « Ce que je vous dis, gardez-le pour vous pendant 2, 5 ou 10 ans », lui glissait-il lors de leurs conversations. François Mitterrand restait ainsi maître de son discours au cours d’une temporalité plus longue. L’impact de son discours reste intact et il préserve la force mémorielle.

 

C’est une coutume française, un vieil héritage, une bien mauvaise habitude, une sorte de duel où l’adversaire se cache ou se dissimule derrière un autre. C’est aussi un mode d’expression qui permet l’approximation. Les journalistes britanniques ou américains que nous rencontrons à Paris se font une règle de refuser le OFF. Ce qui est dit est dit et doit être répété ; sans cela, il n’existe pas. Cela n’interdit pas la conversation informelle, les briefings nécessaires et les explications techniques qui n’ont pas toutes vocation à se retrouver dans le journal. Mais cela est bien différent du OFF manipulatoire.

 

La seconde habitude est celle de la « relecture » à outrance des interviews. Là aussi, les journaux anglo-saxons et quelques rares et sérieuses publications françaises la refusent. Le principe est simple : aucun patron ni aucun politique n’accepte de donner une interview si le média ne lui en autorise pas la relecture, qui est en fait une réécriture partielle des propos.

Je m’efforce d’en déshabituer mes clients : si une prise de parole est solidement préparée, si toutes les questions sont anticipées et si le locuteur se place dans un devoir de sincérité, alors la relecture n’est pas indispensable. Je crois par ailleurs que communiquer, c’est prendre un risque et que sans risque, il n’y a pas de communication efficace, sincère et convaincante.

 

Il n’y a qu’à lire bon nombre d’interviews : le texte est pauvre, prévisible, arrondi, « langue de bois ». Il perd de sa force et de son utilité. La conséquence, c’est le verbe sans message, un désintérêt du lecteur et une défiance croissante envers les autorités sociales.

La relecture est parfois un mal nécessaire. Les imprécisions du journaliste sont parfois telles qu’il faut réécrire pour les corriger. Impréparation, manque de professionnalisme et de culture… les tares sont partagées. D’ailleurs, et c’est là un cercle vicieux, la perspective de la relecture exerce un effet déresponsabilisant sur le journaliste.

 

Mais abolir le OFF et signaler en prologue des interviews qu’elles ont été « relues et partiellement réécrites » (comme un quotidien de référence en avait l’habitude par le passé) permettrait sans doute de gagner en force et en impact ce que les émetteurs perdent aujourd’hui en spontanéité.

 

Et d’éviter à Jean-François Copé de démentir bruyamment le fait d’avoir tenu des propos discrets et donc libérés à une journaliste du « Nouvel Observateur ».

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3 novembre 2011 4 03 /11 /novembre /2011 16:19

J’ai accepté de répondre aux questions de Laureline Dupont (Marianne2). Une interview strictement écrite sur un media en ligne, sans photo ni vidéo. Utiliser une partie seulement des capacités media d’un canal, ce n’est pas pour brouiller les pistes mais pour forcer le lecteur à l’attention et pour tracer une empreinte plus nette.

 

 

Jacques Pilhan est mort, vive Jacques Pilhan ! Ressuscité par un anonyme, le pape de la communication politique sous Mitterrand et Chirac, dispense ses précieux conseils aux candidats de 2012 via un blog lancé le 20 septembre. Seule différence avec le vrai ? Le Pilhan nouveau « n'a pas fait voeu de rareté » puisqu'il publie quasi quotidiennement un billet. Il explique ses motivations à Marianne2, sans se dévoiler. Interview.


Marianne : Vous vous faites appeler « Jacques Pilhan », du nom du conseiller en communication de Mitterrand et Chirac. Mais le « sorcier de l'Elysée », selon le titre de l'ouvrage* de François Bazin, est mort en 1998. Alors, qui êtes-vous ?
 

Jacques Pilhan (2012) : En ressuscitant Jacques Pilhan, je propose de relire les fondamentaux du métier de conseil en communication tels que Pilhan les mettait à l’œuvre. Conseiller, c’est accepter de partager un risque avec la personne que l’on conseille. Conseiller, c’est ne pas tout sacrifier aux dépens de la vérité. Conseiller, c’est refuser de prédire mais mettre son énergie au service du réel, tant pour le comprendre que pour le transformer.

Les communicants doivent remiser le culte de la gestion de crise ou celui de la créativité au profit d’une relation de vérité avec leurs clients : s’attacher à ce que l’annonceur reste au contact du réel, ne pas lui servir systématiquement ce qui l’arrange à court terme… Le métier s’égare lorsqu’il se résume à la protection de son client, à la dissimulation ou au maquillage des faits. Ce n’est pas une question de déontologie mais d’efficacité pour un patron ou un politique qui cherche à construire une relation durable avec son public. On n’exploite pas assez la valeur d’adhésion et d’attention générée par la sincérité.

 

Vous avez vécu les deux campagnes électorales de François Mitterrand, en 1981 et 1988, puis celle de Jacques Chirac en 1995. Selon vous, qu'est-ce qui a changé dans la communication politique aujourd'hui ? Gilles Finchelstein a dénoncé dans un récent ouvrage la « dictature de l'urgence », ce réquisitoire vous paraît-il justifié ?
 

La politique reste l’art de trouver les mots, et que cette expression soit performative. Le défi demeure le même pour tous. Je ne crois pas à la thèse de l’accélération. Les grands cycles d’idées politiques conservent leur durée, souvent une génération ou deux. Le cycle libéral a été entamé il y a près de trente ans en France, et si Nicolas Sarkozy est réélu en mai 2012, il se sera imposé pendant quinze années continues. L’urgence, c’est un ressenti, une excuse. On dit souvent que Sarkozy est le « président du temps court » ; cela me paraît erroné. Il est un homme de temps long, il construit sur toute sa vie, mais il agit sur un rythme serré et sur des séquences raccourcies.


D’ailleurs, tout médiéviste sérieux peut écrire l’histoire de l’Europe du XVe siècle jour après jour. Et la Révolution française s’écrit quasiment heure par heure pendant quinze ans. L’analyse que vous citez traduit un défaut de compréhension des nouvelles dynamiques médiatiques, dont la caractéristique est la complexité plus que la rapidité. Vous noterez qu’après quelques années d’absence, j’utilise des moyens d’expression variés, afin de mieux éprouver ces nouvelles mécaniques d’interpellation et de communication. Nous pensons à la même vitesse qu’hier, mais nous dupliquons plus facilement, plus fréquemment et à plus grande échelle qu’hier. Le danger, s’il y en a un, c’est celui du vide ou de la confusion entre le media et le message.

 

Les deux candidats les plus hauts dans les sondages, François Hollande et Nicolas Sarkozy, semblent tous deux décidés à jouer la carte de la crédibilité. S'agit-il d'une stratégie pertinente et donc payante ou est-ce qu'un troisième homme (ou femme) peut émerger en endossant les habits du renouveau ?
 

Surtout, ne rien prédire… Mais j’observe que Nicolas Sarkozy est parvenu à imposer la question de cette élection : « Qui sera le plus à même de prendre rapidement les bonnes décisions pour restaurer les équilibres (notamment financiers) qui permettront à la France de rester ce qu’elle est ? » Chacun des termes de l’équation compte. Mais il n’est pas encore parvenu à imposer à l’opinion une réponse à cette question. La crédibilité est facteur parmi d’autres.

L’heure n’est en tout cas pas à la demande de changement, mais à la liquidation de la situation existante (la crise, l’endettement, le déficit, l’insécurité, le déclin, etc.). Le président qui sera élu le 6 mai aura été le candidat de l’anti-situation, et non l’incarnation du système qui l’a fait naître.

 

Selon vous, quel sera l'enjeu majeur de la campagne électorale 2012 ? Le spécialiste de l'opinion qui murmure à l'oreille des parlementaires UMP, Guillaume Peltier, considère que le vainqueur sera celui qui prendra en compte l'électorat populaire, vous êtes d'accord avec cette affirmation ?
 

Difficile d’être en désaccord avec une telle évidence ! Un simple rappel : 50% des actifs gagnent moins de 1 600 euros par mois en France. Et le chômage a atteint en septembre le record historique de 4,2 millions de personnes sans emploi. De fait, solliciter le vote des Français, c’est solliciter l’électorat populaire.


En lançant ce blog, pilhan2012, qu'espérez-vous ?

 

Rompre l’ennui.

*Le Sorcier de l'Elysée, de François Bazin, Plon

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31 octobre 2011 1 31 /10 /octobre /2011 09:39

J’ai suivi avec intérêt et étonnement le débat qu’a lancé la majorité sur la saturation du temps d’antenne par les socialistes lors des primaires citoyennes. Il me rappelle celui qu’avait mené avec succès l’opposition au début du quinquennat Sarkozy pour que le temps de parole du président de la République et de ses collaborateurs soit désormais décompté au même titre que celui de la majorité parlementaire (décision du 21 juillet 2009). Le député (PS) Didier Mathus et Jean-Marc Ayrault étaient alors montés au créneau ; je leur avais alors avoué mon franc désaccord.

De mon temps en effet, je m’y serais résolument opposé : la parole du président, rare et puissante, ne doit pas subir la pesanteur partisane ni l’excitation du temps gouvernemental ou médiatique. Si elle le fait jusqu’à se confondre avec  l’expression politique primaire, c’est qu’elle n’est plus ce qu’elle devrait être. Cette différence d’origine, constitutionnelle, devait autrefois lui donner sa valeur.

 

Le 19 octobre dernier, le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) a en effet rendu public le décompte des temps de parole des différents groupes politiques au cours du troisième trimestre 2011. Il en ressort notamment une très forte exposition des socialistes sur les chaînes d’information continue (Itélé, BFM, LCI), et l’obligation pour ces dernières de la compenser au profit de la majorité au cours du dernier trimestre de l’année.

Les uns (l’UMP) se plaignent d’avoir été ostracisés durant les primaires, les autres (les médias audiovisuels) plaident la nécessité de traiter l’information « telle qu’elle est » et, à décharge, la discrétion peu assumée des porte-parole habituels de la majorité.  

 

Cela me surprend à deux titres : c’est la première fois que la droite sous Nicolas Sarkozy s’inquiète du volume de son audience et de sa visibilité. Elle n’a habituellement jamais recours aux calculettes pour conquérir une part de voix, d’influence et d’éditorialisation suffisante. Ou lorsqu’elle le fait, c’est tactiquement pour jouer la victime du système médiatique. Cela s’est avéré assez rare depuis 2007.

Le fait qu’elle réclame aujourd’hui que les médias audiovisuels lui rendent sa monnaie offre un signe visible d’inquiétude à ses adversaires. Les principes qu’avait imposés Nicolas Sarkozy dès 2002 étaient tout autres : imposer dans l’opinion les questions et les réponses, prescrire les bons critères de vote, batailler par la rhétorique. La présence de Nicolas Sarkozy depuis 2002 était autant intellectuelle que physique, autant dans le message (quels que soient ceux qui le portent, y compris ses détracteurs) que dans l’image.

 

Ma deuxième interrogation porte sur l’utilité-même d’un tel crédit de temps de parole à six mois de l’élection présidentielle. Que vont-ils bien pouvoir en faire, aussi tôt dans la campagne ? Je crains que pour cette partie de la représentation politique, qui va souffrir quelques mois du désavantage tactique de n’avoir encore ni candidat ni programme officiel, l’obligation de tenir l’antenne ne produit rien en termes d’opinion. A six mois de l’élection, dans le contexte de candidature du président sortant, l’opinion se cristallise tardivement, sans doute après janvier ou février. Sans porte-parolat ni base rhétorique renouvelée, l’UMP exploitera avec difficulté le temps de parole imparti d’ici au 31 décembre. Je vois mal Henri Guaino, Claude Guéant, Jean-François Copé et Valérie Pécresse tenir à eux-seuls l’antenne pendant trois mois.

Je fais même le pari que cela ne changera rien pour la majorité d’ici là, et qu’en dehors du maigre avantage tactique qu’elle a tiré de cette complainte publique, elle ne gagnera rien à s’exposer pendant les deux mois qui viennent.  Bien au contraire.

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28 octobre 2011 5 28 /10 /octobre /2011 07:42

 « J’ai eu des pouvoirs exorbitants ; c’était trop, mais bien agréable », avait avoué François Mitterrand. L’un de ceux-là, c’est le pouvoir de nomination du président de la République. Ce pouvoir est celui par lequel l’exécutif tient en respect ses amis mais aussi ses ennemis, présents et futurs. J’ai pu moi-même, parfois, mesurer mon influence à l’aune du poids de mes conseils dans les nominations et les révocations effectuées par François Mitterrand. Chacun à sa place, bien entendu – il ne pouvait s’agir que d’aider le Président à la prise de décision, en l’éclairant sur les enjeux de telle ou telle nomination.

 

Un ami (UMP) m’avait confié il y a deux ans que la conjonction quinquennat + interdiction d’un troisième mandat transformait désormais tout second mandat présidentiel en aberration politique. D’après lui, un Président qui n’a plus la faculté, brandie comme une menace, de se représenter encore et encore, perd l’essentiel de son pouvoir et libère les forces centrifuges. Le seul pouvoir restant – le pouvoir de nomination, est alors concentré sur le début de mandat, avant que les impétrants de tout poil n’aillent courtiser la nouvelle génération.

 

Après les caricatures du Hollande « mou », s’est ouverte une séquence peut-être plus critique pour Hollande, car plus précise, offrant les preuves successives de sa difficulté à incarner l’autorité. En toute logique, François Hollande devrait, en tant que challenger de l’élection à venir, bénéficier de l’autorité de celui qui pourra faire et défaire les carrières, demain.

Et pourtant, propos étonnants que ceux tenus dans Libération hier par un proche d’un collaborateur du président, au sujet de la nomination éventuelle de ce même collaborateur à la tête d’une institution : «Même si Hollande l'emporte, il respectera cette nomination si Sarko lui demande». Je suis surpris de n’avoir pas encore lu de démenti du clan Hollande, face à cette tentative de piétiner se qui sera l’une de ses prérogatives les plus essentielles, et un élément fondamental de son autorité.

 

Toujours dans la même séquence s’ajoute l’intervention outrée de Gilles Furigo, chef du Service de protection des hautes personnalités (SPHP) hier soir sur France Info, après le refus poli du candidat du PS de la protection offerte par le Ministère de l’Intérieur. On en est là : c’est le clan Hollande qui a dû calmer le jeu face à des personnes en charge du service de l’Etat, alors même que la position de l’entourage du candidat PS était parfaitement légitime.

Et je referme à l’instant le « Monde » de ce soir, dans lequel je trouve cette citation d’un « proche » : « Quand François était premier secrétaire, il gérait le parti sans autorité. Or il l’est resté. Il n’est pas encore dans le costard. Il est attendu sur son autorité ».

 

Il y a en effet urgence pour François Hollande à ne plus être le sympathique camarade avec qui l’on se prend en photo. Il est temps pour lui d’être craint, notamment par tous ceux dont le destin nécessitera, un jour, sa signature au bas d’un parapheur.

Cela l’oblige à envoyer rapidement à l’opinion des signes d’autorité : décisions audacieuses pour composer son équipe de campagne (en évitant les binômes à toutes les fonctions pour arranger les courants infra-hollandais), images d’autorité lors de ses déplacements ou lors d’une interpellation publique du président et du gouvernement, etc.

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27 octobre 2011 4 27 /10 /octobre /2011 16:11

La contre-programmation, dont j’ai explicité le concept lors d’un précédent post consacré au président Sarkozy, est une technique assez classique dont l’efficacité n’est pas toujours garantie mais dont les ressorts sont inépuisables. L’objectif est toujours le même : dissiper l’attention prévue de l’opinion sur une annonce en produisant du volume et de l’attention autour d’une autre annonce.

Je n’étais donc pas surpris de voir hier l’ancien ministre en charge des Affaires sociales, Laurent Wauquiez, proposer de réserver une partie du parc de logements HLM « à ceux qui travaillent » plutôt qu’aux autres, le jour même où l’actuel ministre du Travail annonçait discrètement que le chômage avait atteint, en valeur absolue, un niveau historique record.

Pas surpris non plus lorsque, après deux coups de fil, je parvins à me procurer la note qui détaillait il y a quelques jours le plan d’annonce et de contre-programmation gouvernemental pour limiter la visibilité de l’annonce d’une hausse du chômage.

J’en publie un extrait, ci-dessous. Ce n’est pas une note pour action, mais une note blanche « de contexte » (non signée) qui cadre et rappelle le dispositif prévu.

26102011.jpg

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25 octobre 2011 2 25 /10 /octobre /2011 12:30

Le feuilleton n’aura pas connu plus de deux épisodes. Hier dans « Le Figaro », Stéphane Fouks, le patron d’Euro RSCG que j’ai bien connu après 1988, offrait ses services à François Hollande. Lequel répond ce matin dans le même quotidien qu’il préfère tenir cette agence de communication à l’écart de sa campagne. Qu’importent les raisons de ce choix, qui appartiennent au candidat et que je peux aisément comprendre.

Mon rôle est plutôt de rappeler trois vérités pour épuiser les fantasmes qui associent trop souvent le talent des communicants aux succès électoraux.

 

Faire de la politique, c’est communiquer, dire, raconter, imposer un récit et un champ d’interprétation de la réalité. Cette thèse, que j’ai faite mienne depuis que j’exerce mon métier, est celle de Lucien Sfez (« La politique symbolique »). C’est comme cela que la politique se pratique au quotidien par les professionnels.

L’hypocrisie du petit monde est immense sur ce sujet : ceux des politiques qui dénoncent les « coups de com » du camp d’en face révèlent ainsi souvent leur médiocrité et ne font pas progresser le sujet. Les apparitions médiatiques des politiques et le relai de leurs messages se font rarement sans que le fond et la forme ne soient négociés ou discutés avec les journalistes concernés. C’est aussi le cas pour les patrons ou pour n’importe quel autre émetteur.

En politique, le « faire » et le « dire » se confondent. C’est un fait, et non un objectif. La limite que je fixe à cela, c’est de le faire dans le respect de la vérité et d’un objectif maître : faire coïncider le signifiant et le signifié.

 

En matière de communication, une campagne présidentielle réclame de la centralité et de l’unité. L’empreinte mémorielle d’une campagne sur les électeurs est faible : deux ou trois sujets, pendant six mois. Inutile d’en faire plus, mais indispensable d’épuiser les cibles avec des messages choisis.

La centralité n’oblige pas au choix d’une seule agence pour tout faire. Les nuisances qui perturbent la diffusion et la réception d’un message sont telles que la communication d’une conquête politique réclame la mise en réseau de compétences plus complexes qu’autrefois. Le temps des agences-conseil uniques autour d’un candidat à l’élection présidentielle est révolu. Le message peut être unique, il vivra sa vie de manière si différente sur Internet, au journal de 20 heures, dans les meetings et sur les affiches que personne ne peut aujourd’hui prétendre au rôle de chef d’orchestre unique d’une campagne électorale.

J’en ai moi-même fait mon deuil. C’est une deuxième vérité : il n’y a pas de campagne pure, de message pur, de conquête pure, d’influence cristalline, de correspondance parfaite entre l’émetteur, le média et le public. La déformation, partie prenante de l’information, est une donnée à prendre en compte à la source de notre travail. Inutile de la déplorer. Communiquer, c’est partir du réel.

 

Enfin, la troisième vérité que je veux rappeler aux communicants, c’est qu’à la source de toute action politique, il ne doit y avoir qu’un politique. Au cœur de la coordination d’une campagne électorale, la place d’impulsion et de direction doit être laissée au politique. L’idée que les communicants puissent se substituer aux politiques ou en faire leur créature tient du fantasme ou de la mégalomanie.

L’influence croissante de la communication dans le métier politique ne doit pas faire perdre de vue aux communicants que leur fonction n’est pas de remplacer mais d’équiper le politique. S’accepter comme outil de démultiplication et de réflexion.

 

Dès lors, le fait qu’Euro RSCG « ne fasse pas la campagne » de François Hollande ne constitue pas une information : aucune agence ne devrait sérieusement se prévaloir du privilège de « faire » une campagne.

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24 octobre 2011 1 24 /10 /octobre /2011 10:40

L’ami dont je vous ai fait partager les réflexions il y a quelques jours m’a de nouveau écrit hier. Je le soupçonne de vouloir que cette correspondance privée figure sur mon blog… (Je publie donc son message, par adhésion et par amitié.)

 

« Cher Jacques,

 

Parmi d’autres choses prometteuses (pour lui-même et ceux qui le soutiendront), François Hollande a, lors de son discours d’investiture samedi dernier, dessiné les contours d’une méthode éprouvée dans le monde de l’entreprise et que je conseille à certains de mes clients lorsque la situation s’y prête : établir soi-même les critères de sa propre évaluation et les imposer à ceux qui en seront les juges, l’opinion publique ou d’autres parties prenantes.

 

Il n’en est qu’à la surface, il doit préciser son propos, mais il a compris que chaque élément de son projet doit être relié à un résultat possible (y compris quand celui-ci est très ambitieux, il faut bien flatter Montebourg).

Il ne peut promettre la réforme pour la réforme – c’est ce que fait la droite depuis dix ans. C’était ça, la victoire culturelle de la droite : donner l’illusion que les réformes conservatrices étaient avant tout des réformes, donc bonnes par nature. Mais elle l’a tellement fait qu’aujourd’hui on en vient à réformer les réformes et prôner la rupture d’avec la rupture ! C’est comme promettre le changement : changer à 360° c’est tourner en rond !

 

Grâce au soin qu’il va prendre à proposer des solutions et les instruments de mesure de leur succès ou de leur échec, Hollande n’aura que plus de facilité à dénoncer l’absence de résultats du président sortant sur les éléments quantifiables de son projet de 2007 (« travailler plus pour gagner plus », « une France de propriétaires », croissance à 3%, etc.), et de tourner en dérision la promesse globale de 2007, non-évaluable donc aberrante dans la crise : « ensemble tout devient possible ».

 

C’est là une leçon du monde de l’entreprise : on ne fait des progrès que sur ce que l’on peut mesurer. J’en reviens à une méthode éprouvée du conseil aux dirigeants en position de conquête : il leur appartient de bâtir eux-mêmes la grille d’évaluation de leur action. Ils doivent l’imposer, s’y référer sans cesse au cours de leur action ainsi qu’ex post.

C’est pourquoi aujourd’hui je vends mieux l’influence que la publicité. Avec les PR, je vends une méthode. Avec la pub, je vends une promesse qui ne vaut que parce qu’elle est mensongère. Ca commence à se voir…

 

Je crois t’avoir déjà raconté cette anecdote : un illustre client m’avait en 2008 dressé cette comparaison entre Nicolas Sarkozy et Barak Obama : « Sarkozy, c’est l’idéologie de l’action, il faut montrer que l’on fait. Cela aboutit à faire des ronds points, parce qu’il faut faire, sans cesse, et dire que l’on fait. Avec Obama, on a affaire à une méthode : on dit ce que l’on veut construire, et on indique le chemin pour y arriver. »

 

Ce que je veux te dire par là, c’est qu’Hollande peut gagner. Mais que surtout, il peut réussir ensuite.

 

Te rends-tu compte ?!  »

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20 octobre 2011 4 20 /10 /octobre /2011 18:22

Conseiller, c’est accepter d’alimenter un cimetière d’idées mortes. Nombre de nos suggestions, de nos hypothèses de travail et de nos recommandations tombent à l’eau : pas assez audibles dans un contexte peu favorable, pas assez solidement étayées, contre-attaquées par nos opposants internes, ou tout simplement erronées.

L’UMP m’a consulté il y a deux semaines, en pleine organisation de la Convention nationale anti-PS du 18 octobre. C’était à l’occasion d’une réunion du groupe de coordination. Je constate qu’ils n’ont pas suivi toutes mes recommandations, me rendant ainsi libre de vous en révéler l’essentiel.

 

J’avais sobrement intitulé mon document : « Gagner encore. Faire campagne sans le Président en 2012 ».

Mon diagnostic : les Français rejettent politiquement la droite depuis les municipales de mars 2008. Ils rejettent personnellement Nicolas Sarkozy depuis le surlendemain de son élection. L’UMP ne se rendra pas politiquement acceptable ni majoritaire avant 2012, de même que Nicolas Sarkozy ne parviendra pas à bouleverser son profil d’identification. Il est déjà trop tard pour s’inventer un rôle qu’on ne sait pas jouer.

La réélection de Nicolas Sarkozy, mise en doute depuis les élections régionales de 2010, s’appuie cependant sur une candidature qui demeure « naturelle » dans l’opinion. Cela exige de Nicolas Sarkozy un dépassement de lui-même et de ce qu’il avait proposé en 2007. Cette exigence de changement est une chance pour le Président-candidat puisqu’elle lui permet et l’autorise à renverser la table. Mais cela l’oblige à mener une campagne personnelle, voire individuelle.

Il le fera pour deux raisons : parce que l’UMP est trop affaiblie et qu’elle présente le visage d’une organisation usée par le pouvoir. Il n’y a qu’à constater la difficulté qu’a l’UMP de renouveler son personnel-vitrine.

 

Il le fera aussi parce que son entourage politique est affaibli par l’accélération des mises en causes judiciaires et politiques.

En résumé : Les Français peuvent choisir Sarkozy si Sarkozy n’est plus l’UMP. Et ils choisiront de nouveau l’UMP lorsqu’elle ne sera plus Sarkozy.

 

J’ai ensuite proposé aux élus et ministres présents trois axes de travail :

Le retour au réel. C’est un retour au réel que la droite devra proposer aux Français en 2012. La crise, qui a marqué l’ensemble du quinquennat, l’impose. L’opposition au projet socialiste aussi. Le retour au réel, c’est faire du pragmatisme une nouvelle ligne politique, et considérer que toute « aventure » politique nouvelle constituerait un danger pour la France. Le retour au réel, c’est enfin le monopole des femmes et des hommes d’expérience. C’est, en ce sens, la « rupture de la rupture » chère à Jean-Pierre Raffarin.

L’UMP a, hélas, douté de ce concept et voulu présenter François Hollande comme le candidat de la nouvelle « utopie socialiste ». Quel service lui a-t-elle rendu ! Alors que François Hollande progresse comme le candidat le plus « réaliste » de l’histoire des candidatures socialistes à la présidence de la République et qu’il délègue volontairement la promesse du grand soir à son aile gauche, qualifier son programme d’utopique a de quoi séduire beaucoup d’électeurs de la gauche de la gauche. C’est la première erreur de la convention UMP de mardi dernier.

 

Tirer profit de l’atomisation de la droite. L’UMP n’est plus le parti unique de la droite. Elle est devenue un groupe filialisé qui, pour s’éviter les ennuis liés à la centralisation et à l’entretien de l’unité, s’est organisée en un conglomérat de PME politiques.

Cet état de fait présente un avantage : l’UMP n’aura plus besoin de présenter une coûteuse unité de façade pour tenter de remporter les élections législatives de juin 2012. La droite populaire convient à la France méridionale, la droite sociale ou humaniste peut mobiliser à l’ouest, et la droite gaulliste canal historique peut espérer conserver les fiefs du reste de la France. Cela présente aussi un inconvénient : c’est la dernière fois que l’UMP peut espérer remporter des élections générales avant une nécessaire refondation, qu’elle perde ou qu’elle gagne en 2012.

En d’autres termes, j’ai déconseillé à l’UMP de tenter de s’unir – et d’exister – par l’opposition au PS, mais au contraire de travailler les 7 mois de campagne en séquençant des messages adressés à des publics qui ne se reconnaissent plus dans une offre monolithique. L’unité de façade épuisera Jean-François Copé comme le maintien d’une URSS vidée de son sens et de ses membres avait fait de Gorbatchev le chef d’un Etat fantôme.

 

Le Président de l’indispensable. La conséquence de cela pour l’UMP, c’est que l’élection présidentielle et les élections législatives de 2012 se prépareront, s’animeront et se dérouleront de manière très séparée. La mécanicité du vote de confirmation « législatives post-présidentielle » n’est pas assurée pour elle.

Aux côtés d'un président éloigné, solitaire et concentré sur l'indispensable (mes récents conseils à Sarkozy ont fait l'objet d'une note distincte que je ne peux révéler pour l'heure), l'UMP se chargera de tout le reste : une plateforme de projets plutôt qu’un parti unique. Une école politique plutôt qu’un Sénat en miniature. Le mouvement de toute la France plutôt que la machine à réélire Nicolas Sarkozy.

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