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20 octobre 2011 4 20 /10 /octobre /2011 18:22

Conseiller, c’est accepter d’alimenter un cimetière d’idées mortes. Nombre de nos suggestions, de nos hypothèses de travail et de nos recommandations tombent à l’eau : pas assez audibles dans un contexte peu favorable, pas assez solidement étayées, contre-attaquées par nos opposants internes, ou tout simplement erronées.

L’UMP m’a consulté il y a deux semaines, en pleine organisation de la Convention nationale anti-PS du 18 octobre. C’était à l’occasion d’une réunion du groupe de coordination. Je constate qu’ils n’ont pas suivi toutes mes recommandations, me rendant ainsi libre de vous en révéler l’essentiel.

 

J’avais sobrement intitulé mon document : « Gagner encore. Faire campagne sans le Président en 2012 ».

Mon diagnostic : les Français rejettent politiquement la droite depuis les municipales de mars 2008. Ils rejettent personnellement Nicolas Sarkozy depuis le surlendemain de son élection. L’UMP ne se rendra pas politiquement acceptable ni majoritaire avant 2012, de même que Nicolas Sarkozy ne parviendra pas à bouleverser son profil d’identification. Il est déjà trop tard pour s’inventer un rôle qu’on ne sait pas jouer.

La réélection de Nicolas Sarkozy, mise en doute depuis les élections régionales de 2010, s’appuie cependant sur une candidature qui demeure « naturelle » dans l’opinion. Cela exige de Nicolas Sarkozy un dépassement de lui-même et de ce qu’il avait proposé en 2007. Cette exigence de changement est une chance pour le Président-candidat puisqu’elle lui permet et l’autorise à renverser la table. Mais cela l’oblige à mener une campagne personnelle, voire individuelle.

Il le fera pour deux raisons : parce que l’UMP est trop affaiblie et qu’elle présente le visage d’une organisation usée par le pouvoir. Il n’y a qu’à constater la difficulté qu’a l’UMP de renouveler son personnel-vitrine.

 

Il le fera aussi parce que son entourage politique est affaibli par l’accélération des mises en causes judiciaires et politiques.

En résumé : Les Français peuvent choisir Sarkozy si Sarkozy n’est plus l’UMP. Et ils choisiront de nouveau l’UMP lorsqu’elle ne sera plus Sarkozy.

 

J’ai ensuite proposé aux élus et ministres présents trois axes de travail :

Le retour au réel. C’est un retour au réel que la droite devra proposer aux Français en 2012. La crise, qui a marqué l’ensemble du quinquennat, l’impose. L’opposition au projet socialiste aussi. Le retour au réel, c’est faire du pragmatisme une nouvelle ligne politique, et considérer que toute « aventure » politique nouvelle constituerait un danger pour la France. Le retour au réel, c’est enfin le monopole des femmes et des hommes d’expérience. C’est, en ce sens, la « rupture de la rupture » chère à Jean-Pierre Raffarin.

L’UMP a, hélas, douté de ce concept et voulu présenter François Hollande comme le candidat de la nouvelle « utopie socialiste ». Quel service lui a-t-elle rendu ! Alors que François Hollande progresse comme le candidat le plus « réaliste » de l’histoire des candidatures socialistes à la présidence de la République et qu’il délègue volontairement la promesse du grand soir à son aile gauche, qualifier son programme d’utopique a de quoi séduire beaucoup d’électeurs de la gauche de la gauche. C’est la première erreur de la convention UMP de mardi dernier.

 

Tirer profit de l’atomisation de la droite. L’UMP n’est plus le parti unique de la droite. Elle est devenue un groupe filialisé qui, pour s’éviter les ennuis liés à la centralisation et à l’entretien de l’unité, s’est organisée en un conglomérat de PME politiques.

Cet état de fait présente un avantage : l’UMP n’aura plus besoin de présenter une coûteuse unité de façade pour tenter de remporter les élections législatives de juin 2012. La droite populaire convient à la France méridionale, la droite sociale ou humaniste peut mobiliser à l’ouest, et la droite gaulliste canal historique peut espérer conserver les fiefs du reste de la France. Cela présente aussi un inconvénient : c’est la dernière fois que l’UMP peut espérer remporter des élections générales avant une nécessaire refondation, qu’elle perde ou qu’elle gagne en 2012.

En d’autres termes, j’ai déconseillé à l’UMP de tenter de s’unir – et d’exister – par l’opposition au PS, mais au contraire de travailler les 7 mois de campagne en séquençant des messages adressés à des publics qui ne se reconnaissent plus dans une offre monolithique. L’unité de façade épuisera Jean-François Copé comme le maintien d’une URSS vidée de son sens et de ses membres avait fait de Gorbatchev le chef d’un Etat fantôme.

 

Le Président de l’indispensable. La conséquence de cela pour l’UMP, c’est que l’élection présidentielle et les élections législatives de 2012 se prépareront, s’animeront et se dérouleront de manière très séparée. La mécanicité du vote de confirmation « législatives post-présidentielle » n’est pas assurée pour elle.

Aux côtés d'un président éloigné, solitaire et concentré sur l'indispensable (mes récents conseils à Sarkozy ont fait l'objet d'une note distincte que je ne peux révéler pour l'heure), l'UMP se chargera de tout le reste : une plateforme de projets plutôt qu’un parti unique. Une école politique plutôt qu’un Sénat en miniature. Le mouvement de toute la France plutôt que la machine à réélire Nicolas Sarkozy.

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commentaires

د
Ah ben voilà Marianne qui me rattrape dans ma connaissance des blogs.
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M
<br /> C'est que vous faites peur avec ces conseils, ça pourrait très bien marcher. L'angle du retour au réel est très bon. Quant à la candidature "en dépit" de l'UMP, c'est brillant !<br /> :-)<br /> <br /> <br />
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